Accords (ou désaccords) sur le partage du pouvoir au Burundi

Alexandre W. Raffoul

alexandre.raffoul@pcr.uu.se

Alexandre Raffoul est doctorant au Département de recherche sur la paix et les conflits à l’Université d’Uppsala et chercheur associé pour la Fondation suisse pour la paix. Ses travaux portent sur les conflits ethniques, le partage du pouvoir et les pourparlers de paix.

Réginas Ndayiragije

reginas.ndayiragije@uantwerpen.be

Réginas Ndayiragije est doctorant et assistant d’enseignement et de recherche à l’Institut de politique du développement (IOB) de l’Université d’Anvers, en Belgique. Dans ses recherches, il s’intéresse au partage du pouvoir, à la consolidation de la paix et à la justice transitionnelle.

 

Résumé

À la veille des élections de 2020 au Burundi, nous aborderons, dans le présent article, la trajectoire tourmentée du partage du pouvoir dans ce pays. Depuis la ratification de l’Accord d’Arusha en 2000, le partage du pouvoir oppose de façon continuelle les adversaires politiques. Le présent article relate les luttes de pouvoir et les transformations institutionnelles au cours de trois périodes pendant lesquelles le partage du pouvoir au Burundi a été négocié (1998-2005), contesté (2005-2015), puis remanié (2015-2020). En conclusion, quelques-unes des répercussions que pourraient avoir les élections de 2020 sur l’avenir du partage du pouvoir au Burundi sont énoncées.

Introduction

Le quatrième cycle d’élections post-conflit du Burundi s’étalera du 20 mai au 24 août 2020. À la suite de la grave crise électorale vécue en 2015 et de l’adoption d’une nouvelle constitution en 2018, ces élections représentent l’aboutissement d’une suite de remaniements qui ont marqué la dynamique du partage du pouvoir au Burundi.

Après plus de dix ans de guerre civile, des décennies de domination de la minorité tutsie (14 %) sur la majorité hutue (85 %) et des vagues répétées de violence interethnique, le partage du pouvoir visait à garantir « la sécurité à la minorité et la démocratie à la majorité [traduction] » (Nindorera, 2019, p. 21). La structure institutionnelle complexe adoptée dans l’Accord d’Arusha pour la paix et la réconciliation au Burundi de 2000 et enchâssée dans la Constitution post-conflit de 2005 était assortie de dispositions sur le partage du pouvoir entre les deux partis politiques et les groupes ethniques.